Du 3 août au 23 septembre 2010, la campagne océanographique FUTUNA 1 organisée par Ifremer avait pour but l’exploration du volcanisme et des systèmes hydrothermaux au sud de Wallis et Futuna. Après une première phase de relevés bathymétriques et de dragages, la deuxième phase a combiné des dragages et des plongées avec le submersible Nautile.
Cette page illustre cette deuxième phase avec des images prises à bord de l’Atalante et au cours des deux plongées que j’ai effectuées sur deux gros volcans sous-marins.
Image Google earth montrant la localisation de la région étudiée, au nord ouest de l’arc volcanique des Tonga
Cadre structural de la zone de subduction du Vanuatu à l’ouest et de celle des Tonga – Kermadec à l’est. Entre les deux s’étend une zone complexe faites de dorsales, de bassins arrières arcs et de grands volcans sous-marins.
La côte volcanique et les plages paradisiaques des Samoa, point de départ de la mission Futuna en 2010.
L’intérieur de l’île est couvert d’une végétation dense qui profite d’un climat chaud et humide et de terrains volcaniques fertiles.
A proximité de la côte, l’océan Pacifique se faufile dans les tunnels de lave, érode les roches et crée de larges dépressions remplies d’eau limpide.
L’Atalante, navire support de la campagne FUTUNA 1, 85m de long, à quai dans le port de Apia dans les îles Samoa.
Tout est près pour le départ, le départ est prévu pour demain. Il est temps d’aller passer une première nuit à bord pour profiter du calme avant d’affronter les vagues du Pacifique…
A bord de l’Atalante, la salle de contrôle de l’acquisition des données bathymétriques grâce au sondeur multifaisceau.
Toujours à bord de l’Atalante, la salle principale de discussion et de cartographie où sont commentées les données au fur et à mesure de leur acquisition, et où se décide le programme des jours à venir.
A plusieurs reprises, des pseudorques (Pseudorca Crassidens) viennent jouer autour du bateau et rivalisent sans peine avec l’avancée du navire.
Deux pseudorques à proximité de l’Atalante. Ils sont toujours en groupes de quelques individus, rarement plus d’une dizaine.
Mise à l’eau de la drague pour la récupération d’échantillons sur le fond de l’océan. la chaine métallique qui permet de mettre la drague à l’eau sera remplacée par un câble métallique avant de descendre la drague.
Une fois la drague dans l’eau, ce sont plusieurs kilomètres de câble métallique qui vont être déroulés, jusqu’à ce qu’elle touche le fond. La drague est ensuite tirée sur le fond pendant plusieurs dizaines ou centaines de mètres, en espérant qu’elle récupère le maximum de roches. Elle est ensuite remontée à bord du navire.
L’arrivée de la drague sur le pont arrière est toujours un moment fort. On voit tout de suite si l’opération est un succès ou pas. Cette fois, la chance est avec nous et ce sont plusieurs centaines de kilogrammes de roches qui ont été remontées depuis les profondeurs de l’océan Pacifique.
Les roches sont déversées sur le pont, et le travail peut commencer. Les premiers à arriver sont les biologistes, qui vont récupérer tous les organismes accrochés sur les roches. Les géologues interviennent ensuite pour trier, sélectionner, casser, prélever, et enfin rejeter à la mer ce qu’on ne peut pas garder.
Un magnifique fragment de pillow-lava, caractéristique des laves qui refroidissent rapidement au fond de l’eau. On voit la structure prismée de façon radiale par rapport au centre du pillow.
En route pour le première plongée dans le Nautile. L’objectif est le Kulo Lasi, un grand volcan sous-marin de 20 km de diamètre avec au sommet une caldera de 5 km de diamètre et plusieurs centaines de mètres de profondeur.
Une petite ouverture, et en route pour 6 à 8 heures enfermés à 3 dans une sphère de 2m de diamètre. Claustrophobe s’abstenir !
Tout est fermé hermétiquement. 1 pilote, 1 co-pilote et 1 scientifique, plus des ordinateurs qui ont la bonne idée de réchauffer l’atmosphère. Mais où sont les toilettes ???
Le Nautile est alors sorti de son hangar pour être mis à l’eau. Seule la sphère habitable est maintenue à pression atmosphérique, le reste du sous-marin est soumis à la pression environnante, qui dépend bien sûr de la profondeur.
A chacun son hublot. Le mien me permet de jeter un dernier regard vers l’arrière de l’Atalante avant de plonger dans le grand bleu.
L’opération est délicate: il faut maintenant mettre à l’eau en douceur les 19,5 tonnes du Nautile qui est pour l’instant suspendu au portique de l’Atalante et stabilisé par un câble vers l’avant.
Le Nautile est lentement descendu dans l’eau, sous le regard attentif des plongeurs dans le zodiac.
Une fois mis à l’eau, le câble porteur est immédiatement détaché par la personne qui se trouve sur le Nautile.
Les plongeurs se mettent à l’eau pour une dernière vérification, mais aussi pour libérer le dernier câble qui retient encore le sous-marin au navire.
Les plongeurs inspectent l’avant du Nautile, libèrent le câble qui le retient encore à l’Atalante et donne le feu vert pour la plongée.
La Nautile est libre et flotte, balloté par les vagues. Il est prêt à plonger, dès que le zodiac aura récupéré la personne encore à l’extérieur….
1800 mètres de profondeur, sur le plancher de la caldera du Kulo Lasi. Les laves se sont figées en boules allongées ou pillow lavas sous l’effet du refroidissement brutal au contact avec l’eau de mer. Ces laves sont très récentes, elles ne sont pas recouvertes de sédiment, et le verre volcanique brille encore…
Ces boules de laves font plus d’un mètre de haut. Le refroidissement de la partie externe au contact de l’eau de mer a permis à la lave de rester fluide et d’aller alimenter une autre boule un peu plus loin.
Plus loin, d’autres pillow-lavas, encore plus sphériques. Une éruption peut être plus ancienne, ils sembles recouverts d’une légère pellicule de sédiments. Les taches blanches sont justement l’illustration de la sédimentation océanique, pluie de particules formées plus haut dans la colonnes d’eau et qui viennent s’accumuler au fil du temps sur le plancher océanique.
De grandes fractures affectent la base du mur de la caldera et laissent apercevoir des laves prismées. Elles sont souvent le refuge de grands poissons paralysés par la lumière des projecteurs
Ces fractures sont aussi le lieu privilégié de circulation de l’eau de mer et des fluides magmatiques. A proximité des cheminées hydrothermales témoignent de la composition riche en métaux de ces fluides.
De fines cheminées hydrothermales, sans doute très jeunes, laissent s’échapper des fluides chauds mais très clairs donc pauvres en éléments métalliques.
Les fluides limpides mais chauds sont bien visibles à la sortie de la petite cheminée centrale où ils troublent la vision du sol à l’arrière plan..
Des draperies de concrétions siliceuses forment des monticules de plusieurs mètres de haut en expulsant des fluides à des températures de quelques dizaines de degrés, sur le plancher de la caldera du Kulo Lasi.
Le bras articulé à l’avant du Nautile permet de placer une sonde thermique aux points de sortie des fluides pour en mesurer la température.
Après une récupération mouvementée, le Nautile est hissé de nouveau à bord de l’Atalante et rentré dans son hangar. On peut alors ouvrir l’écoutille et s’extraire (difficilement!) du sous-marin.
Content de retrouver l’air extérieur, il est alors temps d’aller voir de plus près les échantillons de roches récoltés lors de la plongée, et de préparer le programme de la pongée de demain.
Un aspirateur à eau, fixé à l’avant du Nautile et manipulé grâce à la pince articulée permet d’aspirer des organismes vivants et de les stocker dans deux cylindres en verre qui seront récupérés précieusement par les biologistes dès l’arrivée du Nautile dans son hangar. Ici quelques poissons des grands fonds, ainsi que des crevettes.
Retour aux Samoa. Vive la terre ferme! Finalement, il y en a partout des roches volcaniques en bord de mer, pourquoi aller les chercher au fond de l’océan?….